Agro-sylviculture

L'agro-sylviculture est l'une des branches de l'agroforesterie, agro-foresterie (ou agrosylviculture ou agroforestry pour les anglophones).

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Agrosylviculture au Burkina Faso, avec Borassus akeassii et Faidherbia albida
Agrosylviculture au Burkina Faso, avec Borassus akeassii et Faidherbia albida
Le bocage traditionnel (ici du Cotentin, en France, vers 1945) offrait un compromis intéressant entre protection et exploitation des sols et des écosystèmes. Souvent associé à la culture de frutiers et à l'élevage laitier, il permettait des systèmes polyculture-élevages autonomes et résilients, fonctionnant en boucle fermée, c’est-à-dire sans intrants, et sans déchets
Le bocage traditionnel (ici du Cotentin, en France, vers 1945) offrait un compromis intéressant entre protection et exploitation des sols et des écosystèmes. Souvent associé à la culture de frutiers ainsi qu'à l'élevage laitier, il permettait des systèmes polyculture-élevages autonomes et résilients, fonctionnant en boucle fermée, c'est-à-dire sans intrants, et sans déchets
graminées sous chênes
graminées sous chênes
graminées et herbacées sous oliviers séculaires
graminées et herbacées sous oliviers séculaires

L'agro-sylviculture est l'une des branches de l'agroforesterie, agro-foresterie (ou agrosylviculture ou agroforestry pour les anglophones).

L'agrosylviculture est le nom générique donné à une large gamme de pratiques consistant à associer des arbres (et par extension palmes, bambous, buissons…) aux cultures ou prairies, le plus souvent à raison de 50 à 100 arbres/ha.

Définition, généralités

Le World Agroforestry Centre (ICRAF) a, en 1993, défini l'agroforesterie comme système de pratiques et d'utilisation de terres intégrant, de manière pérenne et volontaire, des arbres dans les cultures agricoles ou pâturages sur la même parcelle ou unité de gestion. Les cultures peuvent être mélangées sur une même parcelle ou s'y succéder dans le temps[1].

Aux produits de la culture et/ou du bétail, les arbres apportent aux paysans bois, fruits, ombre et protection. Ils offrent aussi un abri aux auxiliaires de l'agriculture, tout en augmentant la productivité globale et moyenne de l'exploitation.
La FAO et l'ONU considèrent que il figure parmi les moyens de mieux lutter contre la pauvreté et de contribuer à la restauration d'agro-écosystèmes et de sols dégradés. Des techniques de BRF (bois raméal fragmenté) peuvent être associées pour accélérer la restauration des sols et leur résilience écologique.

Sur le plan paysager –et de la valorisation touristique, de l'amélioration esthétique, particulièrement dans les grandes étendues céréalières– les avantages sont indéniables. Du point de vue agronomique, les arbres et leurs racines et les champignons associés permettent de lutter contre l'érosion et recharger le sol en matière organique. Ils contribuent à lutter contre l'érosion, la salinisation et les inondations par la limitation du ruissellement responsable des pics de crue des rivières. Ils réduisent la pollution des nappes par les engrais agricoles en "pompant" les surplus d'azote libre.
Les arbres agroforestiers forment aussi aussi un stock non négligeable de carbone, à la fois dans leur bois, mais également dans le sol qui est enrichi en profondeur en matière organique par la décomposition continuelle de leurs racines fines, année après année.

En associant arbres et pâturage, ou arbres et cultures, l'agroforesterie contribue à limiter l'érosion et quelquefois à diminuer la pollution par les engrais et les pesticides, tout en facilitant la biodiversité des écotones et des milieux semi-ouverts.

Ces arbres peuvent en outre avoir vocation de conservatoires génétiques éclatés, et par conséquent significativement contribuer à protéger la biodiversité.

Historique

On parle quelquefois d'agroforêts pour désigner les milieux où des populations autochtones vivent d'un mélange d'agriculture, de jardinage et de cueillette forestière, pratiqués sous la canopée ou plus fréquemment dans de petites clairières, sur brûlis avec des pratiques qui ménagent une partie de la biodiversité et lui permettent de se reconstituer rapidement. Ces agroforêts couvraient au début du XXIe siècle environ 1,5 million d'hectares rien qu'en Indonésie). Dans le monde, 150 millions d'hommes, autochtones, vivent encore en forêt, quasi exclusivement en zone tropicale[2].

L'agrosylviculture existe aussi en zones tempérée et froide. De tous temps les animaux domestiques semblent avoir pâturé en forêt où on pratiquait aussi la cueillette et le taillis. Et jusqu'à la fin des années 1960, des buissons fruitiers, des arbres épars, fruitiers ou destinés à produire des bois d'œuvre ou de feu étaient encore omniprésent dans les paysages ruraux de quasi toute l'Europe tempérée, en Asie, comme dans toute l'Afrique et chez de nombreuses cultures traditionnelles des pays du Sud. On les trouvait au bord des champs, dans les cultures et des pâturages, dans les zones humides pâturées, dans les fortifications, voire en forêt même.

Dans l'hémisphère Nord, cerisiers, pommiers, poiriers, pruniers, noisetiers, châtaigniers, noyers, etc. ont ainsi longtemps côtoyé les animaux en pâture et les agriculteurs, avant d'être éliminés par la mécanisation et l'intensification des pratiques agricoles encouragées dès le début du XXe siècle par les États les plus riches. La récolte des fruits locaux n'était pas compétitive face à la concurrence des vergers industriels, en dépit de qualité gustative et d'une variété supérieures.

Le gigantisme du matériel agricole et les remembrements ont encore repoussé l'arbre hors des paysages agroindustriels et certains pesticides ont achevés les arbres des champs. Ce sont en Europe des dizaines de milliers de kilomètres de haies et l'équivalent en biomasse et en biodiversité de plusieurs centaines de milliers d'hectares de forêt qui ont ainsi été perdus en moins d'un siècle.

Enfin, sous la pression de certains lobbies agroalimentaires et agricoles, la PAC européenne de 1992 a primé l'hectare et non la quantité ou la qualité (et, soit les vergers, soit le boisement, soit les herbages, mais non la combinaison de deux ou trois de ces options). L'agro-foresterie a dans ce cas failli disparaître.

Contexte économique et environnemental

Les changements climatiques et l'augmentation du prix des carburants pourraient redonner de leur valeur économique directe aux bois de feu et d'œuvre produits localement :

Agro-sylviculture et biodiversité

Avec le bocage et les systèmes agroforestiers l'agriculture a longtemps conservé une relation d'intérêt mutuel avec l'arbre. Des études récentes montrent que cette association, si elle est bien conduite, est très favorable aux deux partis agro-économiques ainsi qu'à la conservation d'une partie importante de la biodiversité rurale. L'agroforesterie pourrait aider à approcher les objectifs de stabilisation de la perte de biodiversité en 2010.

Habitats de substitution : la structure bocagère, les haies sur talus, les grands arbres éparpillés ou certains alignements, de par leurs structures et les espèces qui les composent offrent des habitats de substitution, pour partie proches d'habitats naturels qui existaient dans les clairières et sur les lisières forestières, facilitant surtout les abeilles et d'autres pollinisateurs et de nombreux auxiliaires agricoles, en particulier dans un contexte d'agriculture biologique ou d'agriculture durable. Des oiseaux insectivores, des chauves-souris, ou encore certains insectes comme les syrphes, dont les larves sont de grandes dévoreuses de pucerons et autres auxiliaires de l'agriculture réapparaissent. Quelques effets négatifs sont possibles (rongeurs, limaces et quelques parasites pourraient être favorisés, mais leurs prédateurs le sont aussi. Aucune observation significative n'a confirmé de tels effets négatifs selon les spécialistes de l'agroforesterie à l'INRA).

La vaine pâture et de nombreux usages locaux ont permis durant des siècles que les animaux domestiques fréquentent les forêts pour s'y nourrir (jusqu'à surexploiter la ressource quelquefois). Ces animaux ont rempli quelques unes des fonctions que d'autres animaux, éliminés ou quasi éliminés par l'homme remplissaient au sein des écosystèmes (mammouths, bisons, rennes, bouquetins, aurochs, rhinocéros laineux, mégacéros, chevaux et herbivores actuellement éteints). En spécifique ils entretenaient des réseaux de [clairière]]s, des gradients variés de pâturage, ils creusaient, fouillaient, remettaient à jour et transportaient les gènes contenus de la banque de graine et de propagule des sols, contribuant à un cycle du carbone et de l'azote ou du phosphore plus naturels qu'avec les engrais chimiques. Le bocage a permis la survivance de nombreuses espèces de lisières et des clairières forestières préhistoriques. Il pourrait retrouver une partie de cette vocation en étant restauré (néobocage) et mieux intégré dans les réseaux écologiques nationaux, européens, panaméricains, etc.

Dans les pays du sud, l'agrosylviculture a surtout été promu et appliquée par Wangari Muta Maathai (prix Nobel de la Paix) et le mouvement Ceinture verte (Green Belt Movement) qu'elle a créé au Kenya, qui a planté plus de 30 millions d'arbres en 30 ans. L'agrosylviculture y présente les mêmes avantages qu'au nord, en offrant une plus grande sécurité aux populations locales et en contribuant semble-t-il à significativement perfectionner le cycle de l'eau.

Avantages

L'arbre a un effet protecteur des cultures (brise-vent, diminution des impacts des pluies violentes, grêles et insolations excessives. L'arbre en compétition avec la culture dès sa plantation enfonce naturellement ses racines plus profondément, en contribuant à décolmater le sol et en facilitant la circulation capillaire de l'eau profonde, tout en permettant aux pluies de mieux s'infiltrer pour recharger la nappe locale.

Les arbres forment un filet racinaire qui passe sous les couches superficielles du sol occupées par les cultures. Les champignons qui vivent en symbiose avec ces bactéries augmentent la fertilité du sol et sa capacité à retenir et faire circuler l'eau et les nutriments, améliorant la productivité sylvicole et agricole.

La croissance des arbres est favorisée par leur exceptionnelle mise en lumière. Ils peuvent dans ce cas être plus bas et moins sensibles aux tempêtes malgré leur exposition isolée (les essences doivent néanmoins être adaptées au terroir et au froid hivernal qu'ils subiront plus qu'en forêt).

Si le schéma de plantation est rendu compatible avec le passage des engins agricoles par un espacement des alignements d'arbres de 15 à 40 m selon les cultures et une taille adaptée, les moissonneuses les plus grosses peuvent circuler. Dans les milieux pâturés, la disposition peut être plus naturelle ou les alignements plus serrés. Et pour ne pas griller ni abîmer ses arbres, l'agriculteur a tout intérêt à utiliser son matériel et les désherbants avec prudence.

Difficultés

Des moyens simples suffisent généralement, mais une protection, surveillance ou entretien sont nécessaires les dix premières années.
Des moyens simples suffisent le plus souvent, mais une protection, surveillance ou entretien sont nécessaires les dix premières années.

Des propriétaires fonciers cherchent depuis quelques années à boiser des terres agricoles. Ces efforts concernent rarement des parcelles riches, plus fréquemment les plus pauvres. Or les milieux pauvres sont les derniers refuges pour un très grand nombre d'espèces de milieux oligotrophes dépourvues d'habitat dans un contexte très eutrophisant.

Par ailleurs reboiser un milieu cultivé est quelquefois difficile : les adventices sont d'autant plus vigoureuses et concurrentielles que des reliquats d'engrais peuvent être importants. La semelle de labour et la dégradation microbiologique, fongique et structurelle des sols peuvent s'opposer à bonne reprise des plants. Les écotypes adaptés aux microclimats non-forestiers (amplitude thermohygrométrique plus importante) ont en grande parti disparu avec les remembrements. D'autre part le «microclimat» des openfields, combiné aux épandages voisins de désherbants, les sols dégradés et les semelles de labour se prêtent mal à la création ex-nihilo de forêts voire de haies (jusqu'à 80 % de pertes voire plus sans précautions spécifiques). Le savoir-faire s'était quasi perdu.

Enfin, les boisements artificiels denses, par exemples de saules en Taillis à très courte rotation (TTCR), peuvent quelquefois être mal perçus par le public, les naturalistes, voire par le monde agricole dont les surfaces cultivables sont lentement mangées par l'urbanisation, les routes, les zones commerciales et autres aéroports. (En extrapolant la tendance des années 1990-2000 INSEE/DATAR, la France sera entièrement périurbanisée en 2160 !) Des arrêtés d'interdiction de boisement ont même été pris à la demande du monde agricole, même dans des régions peu boisées comparé à la moyenne française (ex : Avesnois ; dans le Nord de la France). Néanmoins et dans une certaine mesure, les taillis à courte rotation ou certains systèmes à très courte rotation peuvent avoir une fonction d'abri pour la faune et de corridor biologique (si les taillis sont linéaires sont coupés hors période de reproduction et traités en bandes parallèles superposées non coupées la même année, certaines espèce peuvent dans ce cas se réfugier d'une bande dans l'autre, et il reste l'équivalent d'une haie dans le paysage, bien que cette dernière soit très monospécifique et épuise rapidement les sols pauvres).

Rentabilité

L'INRA a montré à Restinclières que les rendements augmentaient pour les arbres (Cf. engrais en surplus ? qui ne partent dans ce cas plus dans la nappe... ), et globalement pour les cultures. En grandissant, les arbres provoqueront néanmoins certainement de légères pertes les années sèches par ex, mais pas au point de perdre les bénéfices de l'agroforesterie selon l'INRA, avec peut-être même d'autres bénéfices pour les cultures -encore à l'étude- grâce aux micro-climats, à la rhizosphère des arbres ainsi qu'aux auxiliaires qu'ils abritent.

Pour un investissement initial correspondant à environ 5 % de ses revenus, un agriculteur se forme un capital-épargne - bois, en diversifiant et sécurisant son activité. L'entretien modeste concerne principalement les dix premières années de pousse de l'arbre qu'on laisse ensuite pousser. Des essences à haute valeur ajoutée (cormiers, poiriers, merisiers, érables, noyers…) offrent un bois d'œuvre très demandé sur le marché. En France, r (e) boiser un terrain agricole coûtait en 2001/2022 environ 1 220 €/ha, mais pour de véritables boisements agroforestiers, les subventions exigent des dérogations et le respect des règles du Fonds Forestier National (espèces agréées, minimum d'arbres/hectare, conformité aux orientations régionales forestières, etc. ), ce qui peut quelquefois poser des problèmes de choix restreints d'espèces, et amener une relative homogénéisation génétique (induite par les provenances certifiées ou de mêmes pépinières). Dans certaines régions des pépinières spécialisées en espèces «locales et biodiverses» (ex : Pépinière de Hændries, dans le nord de la France), les parcs naturels, les conservatoires des ressources génétiques ou botaniques pouvant apporter leurs savoir, savoir-faire, et des plants.

La rentabilité est aussi agronomique. Les arbres amènent in situ et naturellement des cortèges d'espèces "accompagnatrices" ou auxiliaires (qui surtout se nourrissent des parasites destructeurs de cultures), servant à diminuer l'apport de pesticides. Le cormier (sorbier domestique) attire des acariens tueurs d'acariens néfastes pour la vigne (araignées jaunes et rouges). Les bandes intercalaires cultivées diminuent les risques d'incendie, entretiennent un foncier accessible, et sont protégées par les arbres (brise-vents, ombrage, entretien de microclimats plus doux). Ces arbres seront par ex en Europe : noyer, cormier (sols calcaires), poirier, pommiers, alisier, ou châtaigniers, ou encore noisetiers, ou en altitude, Merisier et érable, etc. à choisir en fonction des conditions climatiques et géopédologiques, des objectifs économiques et/ou écopaysagers.

L'agroforesterie est très adaptée aux systèmes de gestion collective qui existent encore dans certains pays du sud (forêts, champs et pâturages communautaires). Le cacao, le thé, le café, la vanille et la majorité des productions tropicales s'y prêtent.

Limites

Cette pratique peut être pratiquée en zone froide, tempérée ou tropicales, dans une structure bocagère ou non. S'il y a transhumance de bétail, on peut parler de système agrosylvopastoral. Dans les zones arides, les troupeaux de chèvres, moutons et bovins non gardés peuvent cependant rapidement et fortement endommager les arbres.

Amérique du Nord

« Néobocage » protégeant des champs contre l'érosion et du vent dans le Nord-Dakota (photo de 1997) aux États-Unis). Pauvre en biodiversité parce que presque monospécifique, d'une même classe d'âge et soumise aux apports de pesticides, cette haie sera néanmoins une source importante de bois, et éventuellement de BRF, dans un système dit d'agro-sylviculture.
«Néobocage» protégeant des champs contre l'érosion et du vent dans le Nord-Dakota (photo de 1997) aux États-Unis). Pauvre en biodiversité parce que quasi monospécifique, d'une même classe d'âge et soumise aux apports de pesticides, cette haie sera néanmoins une source importante de bois, et peut-être de BRF, dans un système dit d'agro-sylviculture.

Quelques expériences de construction de structures bocagères et d'agrosylviculture ont été conduites en Amérique du Nord. Dans certains cas, l'objectif de réseaux d'îlots boisés, plantés à la demande des chasseurs étaient d'offrir un réseau de petites zones refuges pour encourager les animaux tels que cerfs, chevreuils, ou wapitis à traverser les grandes plaines cultivées. Les peupleraies y ont fait l'objet d'un intense travail dit "d'amélioration génétique" (incluant des productions expérimentales, en plein air de peupliers transgéniques (plus de 70 souches) ), et elles sont fréquemment reconnues comme de la ligniculture et quelquefois de l'agrosylviculture.

Le peuplier hybride n'est pas subventionné par certains États, et d'autres les considèrent comme éligibles aux titres des subventions pour l'agriculture.
L'agrosylviculture désigne fréquemment des arbres plantés par des agriculteurs, mais non sur les mêmes sols que ceux de culture ou d'élevage, sur des zones où les parcelles boisées créent une mosaïque de parcelles boisées et cultivées.

Amérique du Sud

L'agrosylviculture est pratiquée de manière ancestrale en Amazonie, avec au moins huit grands systèmes agrosylvicoles allant des cultures itinérantes sous couvert forestier aux cultures intercalaires ou itinérantes (dans des clairières sur brûlis). Elle permet une production régulière, mieux abritée des UV, des pullulations de pathogènes, avec un minimum d'érosion des sols, en bénéficiant du microclimat bien plus stable là où la canopée a été conservée (Wilkin, 1972). Les déchets et éléments minéraux sont recyclés sur place. Les communautés locales produisent ainsi le manioc, et de nombreuses graines, fruits, légumes, fibres, feuilles et fleurs, médicaments, résines, fourrages, bois de feu et d'œuvre, et quelquefois viande.

Le modèle de la taungya (cultures à l'ombre d'arbres à croissance rapide plantés en alignements) créé en Birmanie au cours des années 1860 a été testée en Amérique du Sud, au Salvador surtout avec succès, mais quelquefois avec des espèces introduites, qui contribuent au recul de la biodiversité (ex : culture de maïs sous alignements d'Eucalyptus deglupta dont Aguirre a montré en 1977 qu'elles étaient plus rentables et plus résistante aux adventices que le maïs témoin cultivé seul. Des cultures intercalaires d'arbres et de légumineuses ou des cultures permanentes de café ou de cacao sont courantes en Amérique du Sud. Diverses études, relayées par la FAO montraient dès les années 1960 (Hunter et Camacho) que sous les tropiques, intercales arbres et autres culture augmentait les rendements. Ainsi au Costa Rica, Hevea brasiliensis pousse mieux avec le cacaoyer dont le rendement est aussi amélioré, comparé aux monocultures d'hévéa ou de cacao (deux espèces initialement forestières). Dans les années 1970, on a aussi montré que des polycultures en succession produisaient plus que des monocultures avec rotation culturale.

Des sous espèces d'Inga, Erythrina, Dalbergia, Gliricidia sepium ou Pithecellobium saman sont couramment associées au plantain ou à des cultures extensives de tubercules et/ou légumes.

En Guyane où les tentatives d'agricultures ou d'élevages intensifs se sont soldées par des échecs, une petite communauté de Hmongs qui a importé les techniques agrosylvicoles d'Asie apporte l'essentiel des fruits et légumes vendus dans les marchés urbains de cette région.

Ces types d'agrosylviculture sont aussi quelquefois un moyen de maintenir de délimiter des propriétés ou des pâturages, ou une production permanente sur des sols fragiles et/ou en pente ou elle vise à restaurer des sols dégradés par le surpâturage introduit par les Européens et Nord-Américains ou par d'autres pratiques culturales inadaptées (labours, culture sur pente, sols nus en saison sèche ou des pluies... ), mais elles régressent sous la pression des pâturages et cultures de soja imposées par les grands propriétaires, appuyés par certains gouvernements. Les écologues regrettent aussi les introductions massives de cultures plus ou moins intensives d'Eucalyptus ou d'essences non autochtones, qui pourraient avoir plus d'impacts négatifs en termes de biodiversité et de conservation des sols que celles de l'hévéa. Boiser le haut des pentes et les sommets de collines protège les sols et perfectionne l'infiltration et la rétention de l'eau. maintenir des bandes boisées (ripisylves) au bord des cours d'eau les protègent pour partie des pollutions par les engrais et pesticides.

Rem : la revue Unasylva de la FAO a consacré son N° 126 au thème «Agrosylviculture en Amérique latine»

Asie du Sud-Est

On y trouve des typologies d'agrosylviculture semblables à celles d'Amérique du Sud, mais également quelquefois des rizières cultivées entre des parcelles forestières (étudiées par Sears dès 1957). La forêt y était protégée pour des motifs religieux (forêts sacrées), par exemple aux Philippines. Ces forêts sont fréquemment actuellement en régression. On cultive dans ces rizières depuis plus de 1 000 ans plusieurs centaines de variétés différentes de riz. En Indonésie, certains paysans possèdent encore des terres en montagne et des rizières éloignées, toutes deux associées à la forêt tropicale.

Europe

La surproduction agricole, la dégradation de l'environnement, l'exode rural, la nouvelle PAC, et la demandent social ont changé la donne, et des évolutions récentes des lois et projets (ex : Réseau écologique paneuropéen, décliné en réseaux de corridors biologiques et trames vertes locales, lutte contre le réchauffement climatique) rendent l'agroforesterie plus rentable et souhaitable.

Les cultures intercalaires sont devenues éligibles pour leur surface exacte (emprise des arbres non comprise). Sur la même parcelle, une bande boisée est éligible à la prime de compensation de perte de revenu (PCPR) sous certaines conditions (indemnité limitée pour 7,10 ou 16 ans, selon la hauteur de tronc, l'essence... ).

La commission européenne a validé les mesures agrœnvironnementales portant sur la création et gestion d'habitats agroforestiers (mesures 2201 et 2202), en compensant les surcoûts dus à la présence des arbres (temps de travail supplémentaire, nettoyage de l'emprise, achat et entretien des protections des arbres, tailles... ). Le contrat (renouvelable) est signé pour 5 ans. Il ne couvre pas le prix des arbres pour les créations de parcelles, mais les CTE ou la nouvelle aide aux actions forestières peuvent le faire. L'agriculteur doit planter ou conserver de 50 à 200 arbres/ha (100 au maximum s'il s'agit de peupliers ou noyers), avec une surface minimale de0,5 ha pour les créations. En périmètre Natura 2000, s'il y a compatibilité avec les objectifs de conservation, ce qui devrait a priori être le cas le plus fréquent, les aides peuvent être majorées. En agroforesterie de culture, les arbres doivent être conduits de façon à permettre la mécanisation (troncs lisses sur 2 m de hauteur au moins). Sont éligibles surtout les fruitiers précieux (noyers, merisiers, poiriers, pommiers, sorbiers domestiques, alisiers) mais également les arbres champêtres tels que chênes, châtaigniers, érables, peupliers. D'autres aides permettent de compléter le dispositif par des haies vives, et certains vergers anciens, bas sont éligibles à d'autres contrats.
Ces haies et ces arbres peuvent jouer un rôle de conservatoire génétique éclaté, avec d'autres aides possibles (voir BRG (Bureau des ressources génétiques), départements, régions, conservatoires et Diren).

Les «aides aux actions forestières» à caractère protecteur, environnemental et social prévoient sous certaines conditions, le financement de l'agroforesterie (circulaire DERF/SDF/C2002-3010 du 7 mai 2001). La bande boisée ne peut dans ce cas bénéficier des aides agricoles PAC (CTE avec un montant minimal d'investissement de 1 000 €, pour au moins 500 m2 plantés. Le bénéficiaire peut ou non être agriculteur.

Dans les années 2000, les CTE et la nouvelle PAC, la demande croissante de qualité (AOC, agriculture raisonnée, lutte intégrée, agriculture bio et respectueuse de la biodiversité et du paysage devraient faciliter le mariage retrouvé de l'arbre et de l'agriculture.
En 2001, l'Union européenne a encouragé cette pratique en désormais la prime versée par la PAC à l'agriculteur dans le cas où il plante des arbres sur une parcelle cultivée.

Projet SAFE (Silvoarable Agroforestry For Europe)  : huit pays sont associés dans ce projet pour prendre en compte l'agroforesterie dans l'évolution de la Politique agricole commune vers un meilleur respect de l'environnement et élaborer un projet de directive.

France

«L'Agroforesterie peut apporter une réponse intéressante pour lier rentabilité économique des exploitations et préoccupations agronomiques et environnementales» a conclu Luc Guyau, président de l'Assemblée permanente des Chambres d'Agriculture[3].

En 2004, près de 30 % des agriculteurs français se disaient motivés pour implanter des parcelles agroforestières, mais l'agroforesterie n'est pas reconnue comme pratique agricole et la parcelle agroforestière n'a pas de statut juridique clair, dans le cadre du fermage par exemple.

Un contrat agroforestier type était en cours d'élaboration en 2002, ainsi qu'un guide selon le Ministère de l'Agriculture.

Le pâturage sous arbre en pré-verger, surtout fruitier de haute-tige a fait ses preuves et n'a jamais complètement disparu. Le système arbres/cultures était lui, devenu rare. Quatre sites privés ou publics sont dans les années 2000 expérimentés en Languedoc-Roussillon (Hérault et Gard)  ; Restinclières (nord de Montpellier, propriété du conseil général de l'Hérault, 52 ha), Vézénobres (Gard, 25 ha), Notre-Dame-de-Londres (Hérault, 6 ha) et Castries (Hérault, 4 ha).

Lors du colloque «L'arbre en réseau» à Rennes, avait été présenté le cas d'un agriculteur qui conservant son bocage pour y produire du bois de chauffage, mais en y plantant du maïs, il a dit avoir ainsi doublé son revenu.

Depuis 1995, au domaine de Restinclières, une trentaine de chercheurs français avec depuis 2002, 60 autres chercheurs européens, testent sur 52 ha la plus grande expérimentation agroforestière d'Europe : noyer et blé en rotation avec le colza, cormier et vignes, pin parasol et vignes (et asperge, luzerne, fétuque) permettent une double récolte : récolte annuelle des cultures, et après quelques années, récolte des fruits puis du bois. À Restinclières, l'agriculteur double son revenu annuel à long terme. L'Inra ne recommande cependant de ne convertir en agroforesterie que 10 à 20 % de la surface, compte tenu de la technicité et du travail supplémentaire induites par cette pratique. Mais une gestion partagée du patrimoine arboré en diminuerait les coûts.

Le ministère de l'Agriculture a annoncé un guide pour encourager cette pratique (répandue en Chine ou aux États-Unis). Espérons que le critère biodiversité sera aussi encouragés dans le choix des arbres (souches locales, variétés adaptées aux micro-climats, et génétiquement suffisamment hétérogènes pour minimiser les risques d'épidémie... et pourquoi pas un mariage heureux avec l'agriculture bio qui développe aussi cette approche.

Des chercheurs étudient de 2000 à 2007 le fonctionnement des systèmes agroforestiers de Restinclières, et surtout la croissance des arbres (CRPF et INRA-CIRAD), les effets sur la productivité des cultures intercalaires (Chambre d'agriculture et INRA), la compétition arbres-cultures (INRA), l'intérêt pour la lutte intégrée (AGRO-Montpellier et INRA) et pour la biodiversité (plantes supérieures (AGRO-Montpellier), oiseaux (Écologistes de l'Euzière) ), l'évaluation des ressources génétiques sylvicoles les mieux adaptées à l'agroforesterie (INRA), et enfin la vision des systèmes agroforestiers par les acteurs du développement local (AGROOF Développement, ENGREF et CIRAD).

Depuis 2006, a été lancé le programme de développement de l'agroforesterie en France pour une durée de deux ans. Financé par le Ministère de l'Agriculture et coordonné par Agroof Développement, ce programme regroupe INRA, Chambre d'Agriculture, CRPF et Biocivam. L'association nationale d'agroforesterie a été créée en France début 2007.

Voir aussi

Notes et références

  1. Agroforestry is a collective name for land use systems and practices in which woody perennials are deliberately integrated with crops and/or animals on the same land management unit. The integration can be either in a spatial mixture or in a temporal sequence. There are normally both ecological and economic interactions between woody and non-woody components in agroforestry
  2. * Rapport d'étape du Sénat français : «La biodiversité, l'autre choc» (33 pages, par l'OPECST)
  3. le 26 janvier 2005 à Paris, lors de la journée nationale sur l'agroforesterie organisée avec l'INRA pour présenter les conclusions de 3 ans de travaux (programme de recherche et de développement européen SAFE

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